ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 458 - 15/06/2003

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Soudan
Le mode de vie au Soudan: islamique ou séculier?


VIE SOCIALE


L’auteur examine la société soudanaise totalement dirigée, selon lui, par la religion islamique

Il n’est pas facile de définir le système judiciaire au Soudan. La Constitution de 1998 est interprétée différemment par les musulmans et les non-musulmans. En fait, le Soudan est un Etat fondalement islamique. Tous les aspects de la vie – l’éducation, les finances, le système bancaire, les médias, la nourriture et les boissons, etc. — tout a été islamisé. Mais aucun responsable n’admettra cela devant un non-musulman ou la communauté internationale.

La Constitution

La Constitution du Soudan est-elle islamique ou séculière? Cette question est souvent posée parce que ses auteurs ont soigneusement évité d’y attacher le label «islamique». Et si on pose la question aux législateurs ou aux autorités, ils ont souvent deux réponses toutes prêtes, selon la personne avec laquelle ils parlent.

Cette stratégie à double face suscite la confusion dans la communauté internationale, tout comme chez les non-musulmans et les musulmans à tendance libérale. Elle montre bien que la réelle intention de ceux qui sont au pouvoir est de marginaliser une grande partie de la population.

Le système judiciaire

Dans un Etat islamique, la Constitution comprend le Coran, la sunna (les paroles du prophète Mohammed) et les opinions des juristes islamiques ou des écoles philosophiques. Ce qui fait peur aux non-musulmans et aux musulmans à tendance libérale, n’est pas ce qui est incorporé dans la Constitution écrite (telle que celle de 1998), mais surtout ce qui est écrit ailleurs (et jamais publié).

Ces documents particuliers contiendraient de sévères peines discriminatoires envers les non-musulmans et les femmes, qui ne se trouvent pas forcément dans la Constitution. Souvent on se réfère à des lois introduites en septembre 1983 (au temps du régime de Ja’afar Nimeiri) et après. La plus importante s’intitule «Sources des décisions judiciaires», une loi de 1983. Cette loi sauvegarde l’islamisation du système légal du Soudan. Dans son article 2.a, elle stipule qu’aucun tribunal n’interprètera un décret d’une façon contraire à la charia (la loi islamique), mais que toute interprétation des principes légaux ou de leurs clauses doit être conforme à la charia, à ses principes et à son esprit général.

Selon la section 3 de cette loi, si le juge ne trouve pas de clauses claires s’appliquant au cas qu’il traite, il appliquera celles du Coran et de la sunna; ou il jugera selon le consensus des écoles islamiques, l’analogie avec les règles islamiques, la jurisprudence au Soudan qui n’est pas en conflit avec la charia, ou selon la loi coutumière, pourvu qu’elle ne soit pas contraire à la charia.

Cette loi fondamentale indique que toutes les sources de la loi au Soudan sont islamiques ou conformes à la charia, sinon elles n’auraient aucune validité juridique. Il faut noter aussi que la reconnaissance des coutumes en tant que sources de la loi ne concerne pas strictement les lois coutumières africaines. La reconnaissance initiale des coutumes, selon la section 5 de la «Loi sur les procédures civiles» (1975), avait bien en vue les coutumes indigènes africaines. Mais cela a changé depuis 1983. Actuellement, on fait référence exclusivement aux coutumes des communautés arabes d’avant la venue de l’islam. Selon la «Loi sur les preuves» (1993), toute preuve en conflit avec l’esprit de la charia, est irrecevable devant un juge.

Islamisation totale

La loi de 1983, «Sources des décisions judiciaires», a islamisé tout le système légal. La loi «Les transactions civiles» (1984) a islamisé les terres. La section 558 de cette même loi attribue la propriété de toutes les terres à Allah (Dieu). Ainsi, l’islamisation de tout le système légal et des terres (sans aucune exception) indique que toute la population du Soudan doit être musulmane.

L’article 4 de la Constitution indique bien clairement qu’Allah est le souverain légitime et réel du Soudan. Des personnes n’exercent la souveraineté de l’Umma qu’en tant qu’administrateurs ou agents d’Allah. (L’«Umma» est la «patrie» ou la «nation» des musulmans). Les non-musulmans ne sont pas considérés comme faisant partie de cette nation.

Ceux qui exercent la souveraineté ou administrent le pays, doivent nécessairement adorer Allah. Par conséquent, l’administration de l’Umma fait partie intégrante du culte rendu à Allah.

Les administrateurs du pays doivent donc être musulmans, puisqu’il n’y a aucune distinction entre l’administration et le culte rendu à Dieu ou à la religion islamique. La Constitution garde le silence sur la participation des non-musulmans au système politique du pays.

L’article 18 de la Constitution de 1998 est aussi strict quant à l’islamisation de toute la population du Soudan. Les clauses de cet article instituent l’Umma au Soudan, où l’islam gouverne toute la vie de la nation. Cette Umma doit être protégée par le «jihad» (guerre sainte), d’où la déclaration du jihad contre les non-musulmans dans le sud du Soudan.

L’islamisation pénètre jusqu’au fin fond de la structure de la société, surtout en ce qui concerne la moralité publique. Les «bonnes mœurs», auxquelles l’article 15 de la Constitution fait allusion, sont conçues d’une façon islamique.

Cette moralité doit être renforcée par la loi. Ainsi, à Khartoum, depuis 1989, les femmes qui distillent des liqueurs sont arrêtées. De même, les femmes sont obligées de porter l’habit islamique et ne peuvent s’asseoir près des hommes dans les transports publics. Hommes et femmes ne peuvent se promener en se tenant par la main. Ceci doit être observé par tous, quelle que soit leur religion. Ce qui montre clairement que pour la loi, tous les Soudanais sont présumés être musulmans.

En d’autres mots, la société soudanaise est totalement dirigée par les principes de la religion islamique.

 


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