ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 461 - 01/09/2003

CONTENTS | ANB-BIA HOMEPAGE | WEEKLY NEWS


Soudan
Kwoto: le seul groupe culturel du Sud-Soudan


CULTURE


Un groupe de jeunes artistes soudanais se présente sur la scène artistique internationale

«Kwoto» est un mot qui a son origine dans l’ethnie toposa du Sud-Soudan. Les Toposa vivent dans le Kapoeta, une région semi-aride entourée de montagnes; ce sont surtout des éleveurs de bétail, bien qu’ils cultivent certaines denrées pour leurs besoins personnels.

«Kwoto», selon les Toposa, est une pierre sacrée apportée par les ancêtres et placée près de la rivière Lovoro. Elle constitue un signe d’alliance, une force unificatrice; elle aurait aussi un pouvoir spirituel. Tout Toposa qui passe près de cette Kwoto doit lancer un caillou vers elle, pour qu’aucun mal ne lui arrive. Ce geste est aussi un signe de respect et de loyauté envers les ancêtres. Kwoto a contribué à garder les clans toposa unis en esprit et en action, formant vraiment ainsi un seul peuple.

Géographiquement, les Toposa occupent la région le long du Kenya et de l’Ouganda. Lors de «la ruée vers l’Afrique» au 19ième siècle, les frontières nationales traversaient les régions tribales. C’est ainsi que certains Toposa se trouvent maintenant au Soudan, d’autres vivent dans la région du Turkana au Kenya, et d’autres encore au Karamoja, en Ouganda. Mais ils parlent tous la même langue, bien qu’avec différents accents.

Pourquoi un groupe culturel Kwoto?

Le groupe culturel Kwoto vit le jour en février 1994, parce que beaucoup de Soudanais étaient profondément inquiets de la disparition de leurs pratiques culturelles traditionnelles, du sectarisme, de la perte d’identité et du manque de cohésion. Aujourd’hui, le groupe est bien plus qu’un ensemble de personnes; il est un centre culturel dont la base si situe au cœur même du Soudan, à Khartoum, la capitale du pays.

En tant que concept et idéal, Kwoto représente une recherche d’unité, une recherche des origines. C’est un retour aux racines, rappelant le passé pour retrouver le riche héritage africain au moyen de l’art, du théâtre, de la musique, de la danse et de l’art oratoire. Son objectif est de révéler la beauté, l’esthétique du peuple soudanais, perdues durant la longue lutte pour le pouvoir. Et il le réalise au moyen de performances artistiques.

Kwoto a commené bien humblement. Ses artistes sont encore pour la plupart des étudiants, hommes et femmes, originaires du Sud-Soudan et des monts Nouba. Actuellement, le groupe joue et chante des danses traditionnelles et des musiques de plus de vingt groupes ethniques, exécutées non-stop. Il est un message vivant qui montre que unité et diversité peuvent aller de pair, et que diversité n’est pas division, pourvu qu’elle soit bien gérée.

Gabriel Zubeir Wakoof, l’archevêque de Khartoum, a été le seul mentor à vraiment s’intéresser au groupe. Il leur a donné des moyens et un endroit pour remiser leurs costumes, leurs tambours et autres accoutrements. Petit à petit, le comité liturgique de Khartoum a amené le groupe Kwoto à animer les célébrations liturgiques, dans un processus d’inculturation. Le groupe a pris part aux célébrations du grand Jubilé diocésain et a participé, à Rome, à la canonisation de Sainte Josephine Bakhita et à la béatification de Mgr Daniel Comboni.

Une expérience internationale

Tout récemment, Kwoto a participé au Festival mondial des Pays-Bas, qui s’est clôturé par un spectacle de deux jours au parc de Tilburg, les 14 et 15 juin 2003. Voici comment le directeur général du Kwoto, Derik Uya Alfred, et son directeur artistique, Stephen Affear, ont commenté cette expérience.

Derik Uya Alfred«Le Festival mondial existe depuis plus de dix ans. Il rassemble des groupes artistiques venant de plus de 35 pays du monde, en vue d’apprendre, de partager, de faire des expériences et de familiariser la société néerlandaise avec différentes cultures. Nous vivons dans un monde de cultures différentes, c’est pourquoi nous devons échanger nos expériences et chercher des occasions de travailler ensemble à différents endroits. Durant le Festival mondial, nous avons mangé différentes sortes de plats néerlandais. Une expérience intéressante! Nous sommes sortis avec des artistes d’autres groupes nationaux. Un de ces groupes venait du Nicaragua, un autre de la Bolivie. Pour se comprendre, on communiquait par gestes!». Un chorégraphe ghanéen s’est déclaré intéressé à coopérer avec Kwoto; et un groupe d’acrobates kenyans, les «Salto Jamboree», pourraient venir au Soudan pour entraîner les jeunes dans l’art de l’acrobatie.

Kwoto s’est préparé longuement au festival. Les participants étaient pleinement conscients que jouer dans une arène internationale, en présence de personnages célèbres dans l’art, la musique et la danse, était pour eux un sérieux défi. Ils savaient aussi que leur groupe représentait un pays dont la réputation est faite presque uniquement de tueries, de famine et de destructions.

Stephen Affear«Nous avons dû nous préparer physiquement à ce programme en Europe, totalement différent de nos représentations habituelles. Normalement, nous n’avons qu’une représentation une ou deux fois par mois. Kwoto a eu le privilège d’ouvrir le festival, le 31 mai. Ce fut une expérience formidable, et les réactions du public montraient que nous avions bien joué. Nous avions un créneau de dix minutes pour présenter notre culture, tant sud-soudanaise que soudanaise en général. Rappelez-vous le Sud-Soudan compte une variété de plus de cinquante groupes ethniques. En quelques minutes, donc, nous devions présenter Kwoto et l’héritage culturel du Soudan. Nous avons été remarqués parce que nous employions des costumes locaux et traditionnels. Les instruments de musique aussi étaient traditionnels, tout comme les danses. Les gens recherchent surtout l’originalité, je crois, et c’est ce que Kwoto s’efforce de fournir. De notre côté nous avons pu faire des découvertes et nous mettre à jour. Nous avons appris le sens de la ponctualité et de bien utiliser notre temps. Nous avons vu des professionnels au travail. Nos jeunes artistes étudiants, qui sont pour la plupart des personnes déplacées à Khartoum, ont eu la chance de partager leur expérience avec des danseurs, des chanteurs, des acteurs et des musiciens professionnels».

Qu’y a-t-il encore sur l’agenda de Kwoto? Et bien, ce sera la cérémonie de la canonisation de Daniel Comboni à Rome, en octobre prochain!


SOMMAIRE FRANCAIS | ANB-BIA HOMEPAGE | WEEKLY NEWS


PeaceLink 2003 - Reproduction authorised, with usual acknowledgement