ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 462 - 15/09/2003

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Mozambique
Kidnappé!


MEDIAS


Le journalisme peut être parfois une profession à risque.
L’auteur décrit ce qui lui est arrivé
quand il fut kidnappé et emmené en Afrique du Sud.

La période qui a suivi l’indépendance a été marquée par la guerre civile et l’instabilité générale. Ainsi, beaucoup de jeunes mozambicains ont été privés de leur droit à l’éducation et, aujourd’hui, ils sont dans l’impossibilité de trouver du travail. Face à cette situation, beaucoup décident de quitter le pays pour trouver du travail ailleurs.

Les mines de Johannesburg, en Afrique du Sud, sont celles qui les attirent le plus car, là-bas, le travail ne requiert pas de certificat d’études mais seulement des muscles capables de manier une pelle. La plupart de ceux qui décident d’y aller n’ont pas de passeport, mais la mafia est là pour les aider à passer la frontière – moyennant payement. Tous n’arrivent pas à Johannesburg. D’aucuns sont attrapés au passage de la frontière et renvoyés au Mozambique.

Je me suis dit que j’avais là un bon sujet et, au mois de juillet, je me suis rendu à la frontière entre le Mozambique et l’Afrique du Sud, au passage Ressano Garcia, pour y assister à l’expulsion de l’Afrique du Sud de quelques Mozambicains qui y avaient travaillé illégalement. Vers 11 h, environ 1.400 jeunes sont débarqués du côté du Mozambique. Certains veulent à tout prix retourner chez eux, mais d’autres avec qui j’ai parlé, disent: «Pourquoi retourner chez nous? Pour faire quoi? C’est hors de question! Nous retournons en Afrique du Sud». Au cours des interviews, j’ai découvert que ceux qui voulaient retourner en Afrique du Sud devaient payer la mafia. Le coût du passage sans passeport revient à 50 dollars. (La mafia est un réseau bien ordonné, parfois de connivence avec les autorités frontalières qui ferment les yeux sur ce qui se passe).

Kidnappé par la mafia

Pendant l’une de mes interviews, deux jeunes s’approchent de moi, disant qu’ils veulent me parler. Ils me conduisent à un étal et me demandent de m’identifier. Je leur dis que je suis journaliste. C’est alors que l’enfer se déchaîne. Ils m’emmènent de force dans une maison et me disent que, si je refuse de collaborer avec les interrogateurs, ils m’y laisseront croupir. Les questions se sont alors mises à pleuvoir de tous côtés.

Enfin ils me disent: «Tu veux savoir comment on leur fait passer la frontière? OK! Tu le verras de tes propres yeux. Je leur dis alors que je n’ai nullement l’intention d’aller avec eux en Afrique du Sud. Mais ils commencent à me battre et déchirent mon passeport. A six heures du soir je me retrouve dans un groupe d’environ 32 immigrants illégaux grimpant la montagne qui sépare les deux pays. Ils m’avertissent: «Ne tousse pas, ne parle pas, ne fais aucun bruit qui puisse attirer l’attention de la police frontalière, sinon il t’en coûtera». Arrivés en haut de la montagne, ils nous montrent comment faire une fourchette avec deux morceaux de bois, dont nous devons nous servir pour soulever la clôture électrifiée. Arrivés de l’autre côté, il ne nous reste plus qu’à descendre dans la plaine, où une voiture nous attend pour nous conduire à une «maison sûre». Je dois y rester jusqu’à ce que qu’ils aient décidé de mon sort. Séparé des autres, on m’ordonne de m’asseoir à même le sol humide, les yeux bandés.

Deux jours passent. Ensuite, ils me mettent dans une voiture, les yeux toujours bandés, et me conduisent à une maison à environ 120 km de Johannesburg. Pendant trois jours, j’ai été continuellement interrogé; ils m’ont pris mes enregistreurs et mes notes et les ont détruis. Mon salut est arrivé sous forme d’une femme venue à mon secours alors que mes tourmenteurs dormaient ivres mort. J’ai marché et j’ai fait de l’auto-stop vers Johannesburg. Là, je me suis rendu à un bureau de police où, finalement, on m’a donné les documents nécessaires pour que je puisse retourner au Mozambique.

La profession de journaliste peut être dangereuse, mais plus que jamais, je suis déterminé à démasquer les escroqueries qui se pratiquent.


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