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Nigeria |
ELECTIONS
Les résultats des élections générales d’avril 2003 sont de plus en plus contestés.
Le débat s’est déplacé vers les tribunauxLa réélection du président Olusegun Obasanjo, du Parti démocratique populaire (PDP), est contestée par le candidat présidentiel du Parti populaire de tout le Nigeria (ANPP), le général Mohammadu Buhari, qui a le soutien de 13 autres dirigeants de partis politiques. L’élection de certains gouverneurs d’Etat est également contestée et portée devant les tribunaux, ainsi que celle de certains membres du Sénat, de la Chambre des représentants et des assemblées régionales.
Une justice, mais pour qui?
Lors de l’inauguration de ces procès, le président de la Haute Cour de justice, le juge Mohammed Uwais, a dit aux présidents de ces tribunaux de remplir leur tâche «sans peur ni favoritisme», soulignant que celui qui n’en tiendrait pas compte devrait faire face à de sérieuses conséquences.
Mais peu avant le début des sessions, le général Mohammadu Buhari conseilla aux membres de son parti de ne pas déposer de plaintes devant ce qu’il appelait «des tribunaux “kangourou”, dont les membres ont été nommés personnellement par le président, impliqué lui-même dans l’affaire». Certains membres de l’ANPP de Buhari, estimant qu’ils obtiendraient gain de cause dans ces tribunaux, ont toutefois ignoré l’avis de Buhari. En fait, des membres du PNP et de l’ANPP, dont l’élection était contestée, ont utilisé différentes méthodes pour conserver leurs sièges. Toute l’affaire ressemble à un drame à grand spectacle, surtout vu des coulisses.
Des jugements à vendre
Il y a eu plusieurs décisions controversées de la part de ces tribunaux pour les recours électoraux. Prenons le cas du président du Sénat, M. Wabara. Son concurrent de l’ANPP a été déclaré gagnant du siège sénatorial d’Abia Sud par la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Que fait alors Wabara? Il se tourne vers la Haute Cour, où il obtient une ordonnance annulant l’élection de son concurrent Peter Obi. La cour s’octroie le pouvoir de déclarer Wabara gagnant et la CENI lui délivre les certificats nécessaires. Quand la nouvelle a été connue, les Nigérians se sont demandé ce qui se passait dans le système judiciaire.
Puis il y a eu le cas du président adjoint du Sénat, Alhaji Ibrahim Mantu, qui avait manifestement perdu les élections dans son district de la province du Plateau Central en faveur d’un jeune politicien, My Philimon Dewa, de l’Alliance pour la démocratie (AD). Mantu s’est démené de tous côtés pour assurer son retour au Sénat et, avant qu’on puisse dire «ouf», il était déclaré gagnant.
Les élections des gouverneurs
La réélection de certains gouverneurs peut être considérée comme une grande farce, surtout celle des hommes sur lesquels les Nigérians avaient fait une croix. Certains d’entre eux, pourtant accusés de détournement de fonds publics, ont réussi — d’une façon ou d’une autre — à revenir dans leurs palais.
Malgré les marchandages politiques et les accusations qui auraient dû empêcher certains gouverneurs de se représenter aux élections – et même les envoyer en prison –, les tribunaux semblent leur avoir donné un certificat de bonne santé politique et confirmé leur réélection.
Pourtant la loi anti-corruption, section 182-1 de la Constitution de 1999, stipule bien clairement que «aucune personne inculpée de détournement de fonds ou de fraude par une commission judiciaire d’enquête ou par un autre tribunal d’enquête, ne peut se présenter aux élections pour le poste de gouverneur d’Etat».
Ces quatre dernières années, la commission anti-corruption a reçu plus de 400 accusations concernant les activités de certains gouverneurs. Parmi ceux qui auraient pu être traduits en justice, il y a les gouverneurs Adebayo Adefarati, Depriye Alameyesigha, Abubakar Audu, Ahmed Sani, Lucky Igbinedion, Abdullali Adamu, etc.
Pourtant jusqu’ici, aucun n’a été obligé de rendre des comptes, ni aucune réélection n’a été annulée pour cause d’allégations de corruption. Tout démontre que ces cas traduits en justice n’aboutissent à rien, sous prétexte «d’immunité».
Evidemment, le peuple du Nigeria n’a plus confiance dans ce système judiciaire, et beaucoup se demandent: «Y aura-t-il une justice? Et pour qui?».
- Kenneth Dareng, Nigeria, septembre 2003 — © Reproduction autorisée en citant la source
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