ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 466 - 15/11/2003

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 Burkina Faso
Sans éducation, point de développement


DEVELOPPEMENT


Le rapport 2003 du PNUD est peu flatteur pour le Burkina Faso

Une fois encore, et d’une façon désormais récurrente, le dernier rapport du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) n’est pas du tout flatteur pour le Burkina Faso. Celui-ci ne parvient décidément pas à se faire une place honorable au classement annuel des nations engagées dans la bataille du mieux-être. Citoyens ordinaires, intellectuels, professionnels des médias et autorités politiques, atteints dans leur fierté patriotique, maugréent contre ce rapport.

Un sentiment de frustration

Classé 173ème sur 175 pays évalués à l’échelle mondiale, ce positionnement résonne comme une sanction et comme l’expression d’un développement manqué. Certes, les Burkinabè se savaient mal lotis dans des domaines tels que l’accès à l’eau potable, l’éducation et la santé pour tous, mais sûrement pas au point d’être en queue de peloton d’un classement mondial du développement.

Il est de notoriété publique que ce pays sahélien et enclavé n’est pas un pays de cocagne; mais ce qui a pu frustrer les Burkinabè, c’est de tomber si bas d’une année à l’autre. Ce qui paraît difficile à admettre, c’est le contraste saisissant entre la réputation de peuple travailleur dont jouissent les Burkinabè, et cette appréciation sévère qui amène aussi bien le citoyen ordinaire que les autorités gouvernementales à douter d’eux-mêmes, malgré une croissance annuelle du PIB par habitant qui atteint 2% (entre 1990 et 2001).

L’index IDH du PNUD

Pour le PNUD, le principal baromètre du bien-être est l’Indice de développement humain (IDH), un instrument élaboré pour en refléter les aspects fondamentaux. Cet indicateur composite comprend trois éléments représentant chacun un objectif à atteindre: l’espérance de vie, le niveau d’éducation et le produit intérieur brut.

C’est sur cet ensemble que le jugement du PNUD reste défavorable pour le Burkina qui aurait certainement fait meilleure impression s’il avait été question du patrimoine culturel du pays, riche de son cinéma et de son artisanat de grande réputation. D’où l’inquiétude et l’indignation ressenties par les Burkinabè qui accueillent non sans peine ce classement si dévalorisant à leurs yeux.

Mais ceux qui font l’effort d’analyser ce rapport la tête froide et avec une certaine hauteur de vue, y voient l’occasion d’une interpellation des gouvernants sur la réalité sociale d’un pays qui ne se porte pas si bien, au-delà de ce que le discours officiel et une diplomatie friande de rendez-vous politiques et de sommets internationaux, peuvent laisser croire. Avec un PIB de 2,2 milliards de dollars et une espérance de vie qui oscille entre 45 et 47 ans, nul ne s’engagerait à affirmer que le commun des Burkinabè vit particulièrement vieux et heureux. Le rapport du PNUD fait état d’un ratio de trois médecins pour 100.000 habitants. Et le VIH/sida, dont le taux de prévalence est l’un des plus élevés de la sous-région (6,5%), y fait des ravages en dépit des programmes initiés et exécutés annuellement à coup de milliards de francs CFA.

L’éducation, talon d’Achille

La sagesse africaine enseigne que lorsqu’on tombe, le plus important n’est pas de s’attarder sur le lieu de sa chute, mais d’identifier l’obstacle qui vous a fait trébucher. Dans le cas du Burkina, cet obstacle porte un nom: scolarisation.

En effet, le Burkina Faso représente l’une des expériences les moins réussies en matière de scolarisation sur le continent africain. Le pays fait pâle figure avec un taux d’alphabétisation des adultes qui ne dépasse guère les 25% pour la tranche d’âge des 15 ans et plus.

Depuis 1990, le taux de scolarisation, un des critères déterminants d’appréciation du développement, est demeuré en deçà des normes acceptables (40%) définies par le PNUD. Le régime avoue sa difficulté à s’affranchir de ce qu’il considère comme une tare héritée de la période des indépendances. Toutefois, le rapport 2003 du PNUD crédite le Burkina d’un taux brut de scolarisation combiné (du primaire au supérieur) de 22%, contre 29% pour le Mali, 39% pour la Côte d’Ivoire, 45% pour le Nigeria et 49% pour le Bénin.

Ce rapport lance un signal d’alerte sur le front de l’éducation. Le Burkina ne peut s’offrir le moindre répit dans la lutte engagée contre l’ignorance et la non-scolarisation par le biais de son Programme décennal de développement de l’éducation de base et la création récente d’un Fonds national de soutien à la scolarisation.

Reproches au rapport du PNUD

Tout en reconnaissant que le classement du Burkina est tout sauf un motif de fierté, la presse voudrait édulcorer la sévérité du jugement. Les uns émettent des doutes sur la sincérité et la fiabilité des données ayant servi de base aux experts du PNUD, tandis que d’autres conçoivent mal que, même des pays ruinés par des années de guerre (Liberia, Sierra-Leone, République démocratique du Congo, Ethiopie, etc.) aient pu supplanter le Burkina Faso dans cette évaluation.

Aux auteurs du rapport, il est également reproché d’avoir confondu torchons et serviettes en faisant abstraction des spécificités géographiques et des potentialités naturelles de chaque pays. Autrement dit, l’instrument de mesure du bien-être ne saurait être le même pour les pays du sud et ceux du nord, pour nations pauvres et nations riches. L’Afrique sort forcément perdante d’une telle uniformisation des critères d’évaluation, du moins si l’on fait fi des disparités inhérentes à la nature elle-même et qui ne sont guère à l’avantage d’un pays comme le Burkina Faso.

Mais, au-delà de ses faiblesses ou de ses excès, ce rapport a le mérite d’ouvrir nos yeux sur l’évidence d’une série de corrélations dans le champ du développement humain. Notamment la corrélation entre le taux brut de scolarisation et l’indice de développement humain, et celle encore plus évidente entre la promotion de l’éducation et la lutte contre la pauvreté. De ce point de vue, les Etats africains, dont le Burkina Faso, gagneraient à intégrer les stratégies relatives à l’"Education pour tous" dans les initiatives plus larges de réduction de la pauvreté conçues et mises en œuvre aux niveaux national, régional et international.


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