ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 359 - 01/01/1999

CONTENTS | ANB-BIA HOMEPAGE | WEEKLY NEWS



Burundi

Ne perdons pas l'espoir!


by Spès-Gaudence Manirakiza, Burundi, novembre 1998

THEME = SIDA

INTRODUCTION

La problématique du VIH-sida est une réalité qui préoccupe le Burundi:
il s'agit d'un fléau au même titre que la guerre.

L'infection progresse exponentiellement en milieu rural, mais semble se stabiliser en milieu urbain. En 1992, la séroprévalence chez la femme enceinte du milieu rural était moins de 2%, tandis qu'en 1995 ces chiffres atteignaient 8%. La situation de crise dans laquelle vit le Burundi ne permet pas d'effectuer comme il faut la surveillance épidémiologique: beaucoup d'hôpitaux ne font plus la notification des cas de sida, comme ils le faisaient avant la crise, et les "sites sentinelles" ne fonctionnent plus correctement, à cause de l'insécurité sur certains axes routiers. Cependant, les statistiques les plus récentes (1998) montrent qu'en milieu rural, p.ex. dans un petit centre de Kiremban, dans la province de Ngozi, au nord du pays, la proportion des femmes enceintes séropositives qui viennent en consultation prénatale se situait autour de 3%. En milieu semi- urbain, les chiffres atteignent 15%.

Bien que les conditions de sécurité ne permettent pas de réaliser une enquête plus récente (la dernière étant celle de 1989-1990), l'ONUSIDA (organisation des Nations unies contre le sida) estime que le nombre de personnes vivant avec le VIH au Burundi tourne autour de 260.000, sur une population de 5,5 millions de Burundais, ce qui place ce pays dans la zone rouge de l'infection VIH.

Selon le docteur Spès Ntabangana, chargée du volet épidémiologie au Programme national de lutte contre le sida, les causes de cette situation sont multiples. Elle cite notamment la guerre: qui dit guerre, dit déplacement des populations. Les gens s'adonnent facilement à la prostitution, et les maladies sexuellement transmissibles, qui font le lit de l'infection du VIH dans l'organisme, augmentent par manque de médicaments. Elle fait remarquer aussi que la tranche d'âge la plus touchée se situe entre 25 et 29 ans. Cependant, tout n'est pas perdu, car il existe encore des femmes et des hommes de différentes institutions qui mènent des efforts considérables pour lutter contre ce fléau.

Efforts de l'Eglise

Bonaventure Ntaconayigize, chargé de l'information et de la formation au Centre d'entraide et de développement-CARITAS, nous explique ce que l'Eglise fait dans ce domaine: "L'Eglise catholique dispose sur tout le territoire d'environ 61 centres de santé. On trouve dans ces centres des équipes de prise en charge qui font des dépistages volontaires du VIH-sida. Si le personnel soignant trouve des cas de séropositivité, il les prend en charge sur le plan médical, et surtout sur le plan pyscho-social, en les aidant à garder espoir, d'accepter cette maladie comme partie intégrante de leur vie, en leur montrant que Dieu ne les a pas oubliés, qu'ils doivent vivre cette nouvelle vie malgré leur souffrance."

Les équipes oeuvrant auprès de ces centres de santé mettent un accent particulier sur la sensibilisation des communautés chrétiennes de base. Elles sillonnent les collines pour sensibiliser la population à garder les valeurs culturelles en adoptant un comportement sain.

Dans l'enseignement non formel communément appelé les "Yaga-Mukama", on sensibilise les jeunes à ne pas faire des jeux dangereux et à préparer un avenir certain pour leur famille.

Assistance morale et médicale

"Inutile de faire un dépistage à une personne qu'on ne peut pas assister matériellement, insiste notre interlocuteur, car ce qui tue le plus ces malades du sida, c'est la misère". Arrivés à un stade avancé, les malades s'affaiblissent. Certains bienfaiteurs, comme MISEREOR et CARITAS, les assistent en médicaments et en lait afin de les aider à récupérer du poids.

Il existe beaucoup de groupes de gens qui se donnent corps et âme pour aider les sidéens. Ils vont les trouver sur leur lit d'hôpital, ou dans les camps de déplacés, ou chez des familles d'accueil, et ils posent des gestes humanitaires en les lavant, en les soignant, en leur apportant à manger et en les accompagnant dans la prière jusqu'à la mort. Parmi ces groupes, on peut citer notamment le groupe du grand séminaire de Bujumbura, les Caritas paroissiaux, ainsi qu'une vingtaine d'associations comme l'Association nationale de soutien aux séropositifs et sidéens, la "Society Women on Aids in Africa", etc.

"Nouvelle espérance" au secours des pauvres

"Nouvelle espérance", dont les activités ont commencé en 1992, est une oeuvre du diocèse de Bujumbura, située dans le quartier de Buyenzi, avec comme objectif d'assurer un service d'écoute et d'assistance sociale, ainsi que des soins médicaux ambulatoires aux malades du sida et à leurs enfants. Elle participe aussi activement à la prévention du sida dans les quartiers de Bujumbura.

Le Père Ludwig Peschen, prêtre-médecin de la congrégation des missionnaires d'Afrique, parle des activités de cette association. "Nous nous mettons à l'écoute des personnes et nous essayons de les aider. Par exemple: deux jeunes, tous deux séropositifs, veulent se marier; ils viennent discuter leur situation, les impacts, la question d'avoir des enfants et les risques à ce propos etc... Un bon nombre de membres de "Nouvelle espérance" paient une petite cotisation pour soigner des maladies comme les diarhées, les plaies, la fièvre... Nous cherchons avec eux comment créer quelques activités rémunératrices. Nous assurons aussi des soins à domicile, surtout chez ceux qui ont très peu de moyens pour arriver dans notre centre. Dans certains camps de déplacés, comme à Buterere, nous avons loué une maison où nous accueillons les malades du sida...".

Le Père Ludwig exprime sa satisfaction de voir un grand progrès dans le comportement des gens: on n'a plus peur de dire qu'on est sidéen, alors qu'il y a quelques temps cette maladie était considérée comme la lèpre.

Témoigner de l'affection aux orphelins

"Famille pour vaincre le sida" (FVS) fut créée en 1990. Suite à la misère de beaucoup d'enfants qu'on rencontrait dans les hôpitaux et qui n'avaient pratiquement pas d'assistance, un groupe de femmes, surtout membres du corps médical, ont alerté leurs amis, voisins et collègues. Elles ont constaté que beaucoup de ces enfants avaient perdu leurs deux parents à cause du sida. Elles ont alors décidé de créer une association d'aide aux orphelins du sida, et plus tard elles ont élargi le cercle aux orphelins de la guerre et à tous les enfants qui ont des problèmes. Elles aident les enfants en leur procurant de la nourriture et soutiennent leur scolarisation.

La responsable de cette association, S. Nihangaza, attache une grande importance à l'affection qu'on offre aux orphelins: "On écoute les enfants qui ont des problèmes particuliers notamment ceux qui ont assisté à l'agonie de leurs parents et qui ont subi une sorte de traumatisme. Quand on les accueille au siège, notre rôle est de leur témoigner une affection, une ambiance familiale afin que l'enfant puisse surmonter ses problèmes mentaux". Les enfants qui ont perdu leurs deux parents et qui ne sont pas recueillis par un membre de la famille, sont hébergés par FVS, quitte à faire ensuite des recherches pour retrouver leurs familles d'origine ou leur trouver une famille d'accueil.

Mais est-ce facile de trouver une famille d'accueil pour des orphelins du sida? Le problème est lié à l'ignorance des modes de contamination, répond S.Nihangaza: "Il y a ceux qui pensent que tous les enfants nés de parents infectés par le sida ont la maladie, alors que ce n'est pas le cas. Beaucoup d'enfants sont sains. Il y en a d'autres qui pensent que si l'enfant est contaminé, il va contaminer ceux de la famille d'accueil, car ils ne savent pas que le sida ne se transmet pas par les gestes de la vie courante. L'obstacle est en fait cette ignorance, mais aussi la peur des charges encourues. Le nombre d'enfants nécessiteux augmente presque chaque jour. Nous sommes obligées de nous limiter parce que nous n'avons pas de moyens suffisants pour satisfaire tous les orphelins qui viennent nous trouver. Cependant, certaines associations nous aident à soigner nos orphelins et à les scolariser".

En plus de la prise en charge des orphelins, FVS mène des campagnes d'éducation et de sensibilisation de lutte contre le sida dans les provinces rurales et dans la capitale. Elle forme des animateurs à travers toutes les régions pour qu'ils puissent servir de relais en répercutant les messages de prévention du sida.

Ces messages, adressés surtout aux jeunes, sont centrés sur les modes de transmission, les conséquences du sida pour la famille, l'individu et la communauté, la manière dont les jeunes peuvent agir pour limiter la propagation du sida dans leur milieu, etc.

Pour les adultes, on insiste surtout sur les conséquences du sida, en montrant que lorsque l'un des conjoints est infecté il n'épargne pas l'autre, et en leur rappelant qu'ils peuvent donner naissance à des enfants contaminés et qu'ils vont mourir en laissant derrière eux des orphelins avec toutes les conséquences que cela engendre. On constate cependant qu'il y a encore un besoin énorme au niveau de l'information.

END

CONTENTS | ANB-BIA HOMEPAGE | WEEKLY NEWS


PeaceLink 1999 - Reproduction authorised, with usual acknowledgement