ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 359 - 01/01/1999

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Niger

La conscience du danger


by Djibo Alfari, Niamey, Niger, septembre 1998

THEME = SIDA

INTRODUCTION

Au début, cela paraissait une fable destinée à faire peur...

Quand, en 1987, on découvrit les premiers cas de sida au Niger, cela semblait à beaucoup de nos compatriotes comme une sombre légende destinée à d'autres, pas nécessairement à eux!... Le sida était comme le fameux monstre du Loch Ness: tout le monde en parlait, mais il ne montrait guère son visage d'épouvante.

Cela n'était pas étonnant, tant nos populations étaient, et sont encore, malheureusement habituées aux nombreuses endémies ou pandémies qui opèrent des coupes sombres au sein des populations. Il suffit de rappeler les ravages du paludisme, de la tuberculose, de la fièvre jaune, de l'onchocercose, etc. Ajoutez à tout cela le poids de l'analphabétisme et de l'ignorance. Aux yeux du grand nombre, le sida ne pouvait donc constituer une maladie dangeureuse! Cependant, des progrès ont été accomplis, car de nos jours tout le monde en parle et il n'est probablement aucune région du pays qui n'ait été informée de l'évolution de la terrible maladie.

Situation actuelle

De 40 cas signalés en mars 1987, le Niger a atteint en 1998, soit une dizaine après, le nombre de 3.500 cas! Ce chiffre peut être considéré comme "dérisoire", comparé à la situation qui prévaut dans les autres pays de la sous-région comme la Côte d'Ivoire, le Ghana, le Burkina Faso... Cependant, quand on regarde de près la tranche d'âge concernée, il y a lieu de s'inquiéter sérieusement pour l'avenir de notre pays. Cette tranche d'âge se situe invariablement entre 20 et 39 ans!

Les régions les plus touchées actuellement sont la Communauté urbaine de Niamey (CUN) et le département de Tahoua. A lui seul, ce dernier représentait plus de 1000 cas en 1997. Ce fait s'explique en bonne partie par la grande migration rurale des habitants de la région vers les zones côtières comme le Ghana, la Côte d'Ivoire, et vers d'autres pays de l'Afrique centrale. Non avertis ou insuffisamment sensibilisés dans ces pays d'accueil, ils reviennent en majorité porteurs du virus. Mais la migration n'est pas la seule cause. Il convient de souligner aussi le poids déterminant de la prostitution des jeunes. La misère et la dégradation de la situation socio-économique engendrent naturellement de tels comportements qui contribuent à la propagation de la maladie.

Les mesures

Devant l'ampleur du phénomène, l'Etat nigérien a vite pris les mesures qu'il convenait d'adopter. Dès mars 1987, une table ronde radio-télévisée sur la question était organisée au cours du même mois. En avril 1987, fut mis sur pied un Comité national de surveillance du sida (CNSS); le 23 avril, un autre Comité de lutte contre le sida était créé par arrêté ministériel. Pour la période d'août 1987 à décembre 1988, avec l'appui de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), un plan de lutte à court terme fut institué.

En janvier 1989, un autre plan, à moyen terme, fut adopté pour la prévention et le contrôle du sida au Niger, s'étendant jusqu'à 1991.

Enfin, en 1990, fut créé un Programme national de lutte contre le sida (PNLS), en lien avec les organisations internationales. Au-delà du sida, ce programme s'occupe de toutes les maladies sexuellement transmissibles (MST).

Au sein de cette même institution nationale, on installa aussi un Centre de documentation, avec l'appui de la Coopération française. Ce centre a pour objectifs majeurs:

Il convient de souligner le travail remarquable du programme de lutte contre le sida et les MST au Niger. Le PNLS est en même temps un cadre de réflexion continue, de sensibilisation et de thérapeutique. Chaque jour, des dizaines de prostituées et autres séropositifs y vont pour des consultations gratuites et pour y recevoir des conseils salutaires.

La société civile s'est vite elle aussi impliquée dans cette lutte contre le sida. Un grand nombre de séminaires de sensibilisation et d'information ont été organisés dans tous les départements du pays. Les associations religieuses et la chefferie traditionelle y sont pleinement impliquées. Il s'agit ainsi de profiter de leur poids moral pour amener les couches récalcitrantes et traditionalistes à changer de comportement. En général, après avoir assisté à des projections et pris connaissance de la réalité, les participants à ces séminaires en sortent toujours profondément émus et inquiets. C'est là un signe encourageant d'une prise de conscience subite d'un mal pernicieux qui se cache dans notre organisme social.

A Niamey, plusieurs ONG s'impliquent quotidiennement dans cette tâche. Ainsi l'ONG "Mieux vivre avec le sida" (MVS) mène plusieurs activités. D'après son bilan d'activité pour l'année 1997, dans la seule ville de Niamey, l'ONG a pu sensibiliser quelque 3.900 personnes; 350 autres se sont adressées à elle par téléphone, par courrier, ou même par une visite personnelle; elle a même procédé à la distribution gratuite de 23.000 préservatifs. Ces chiffres témoignent de l'effort que fournissent les ONG avec l'appui des partenaires extérieurs, et de leur impact.

En plus de ces activités courantes et quotidiennes, on fait appel à des artistes pour informer et sensibiliser. Ainsi produit-on, ici ou là, des sketches et des chansons illustrant la maladie, son origine et son évolution. Il faut toutefois souligner l'urgence, toujours actuelle et continue, de sensibiliser et informer si possible toutes les populations sur le péril commun que constitue le sida. L' Etat et les ONG le font avec la participation constante de l'OMS, la France, le Luxembourg, le Fonds européen de développement, et d'autres.

Le travail continue, car pour le pays il s'agit là d'une question de vie ou de mort. Quand la jeunesse entière d'un pays est menacée, c'est l'existence même de ce pays qui est en jeu. Les Nigériens semblent avoir pris conscience de ce péril. C'est tant mieux.

END

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